Sigma 20mm f1.4 DG DN

//conclusion in english at the end of the article Une optique que j’attendais depuis longtemps qu’elle soit optimisée pour appareil hybride, le 20mm f1.4. J’ai déjà pu tester son grand frère en 2018. Il s’agissait d’une version reflex qui souffrait de quelques défauts comme de la coma sur les étoiles en astro et surtout un fort encombrement avec une lentille frontale massive empêchant d'y monter des filtres classiques! Heureusement, l’avènement des appareils sans miroir permet de revoir totalement les formules optiques et gagner en encombrement particulièrement avec les objectifs grand angle et lumineux. C'est ainsi qu'après 4ans de développement depuis la version HSM, un 20mm f1.4 complètement revu au gout du jour arrive sur le marché. Nous voilà avec le Sigma 20mm f1.4 DG DN. Le DN signifie justement que la formule optique est revue pour les appareils hybrides. Etant ambassadeur chez Sigma Suisse, j'ai eu la chance de pouvoir tester cet objectif une semaine et demi avant son annonce officielle. Je vais pouvoir éplucher ses performances et vous faire un retour dans les règles de l’art. Je tiens à préciser que mon retour n'est pas biaisé par Sigma, je n'ai aucune contrainte ;)   Encombrement Il est sans aucun conteste plus compact que le 20mm f1.4 DG HSM ART. Il est aussi presque 2x plus léger (0.6kg vs 1.1kg). Cette différence de poids est importante et permet de le rendre plus polyvalent. On hésitera aussi moins à le glisser dans son sac photo si l'on part faire une balade où l'on est pas sûr de l'utiliser. Sa lentille frontale est aussi bien moins bombée et proéminente, ce qui facilite grandement le nettoyage de la frontale. Il est d’ailleurs possible d’y monter des filtres vissant d’un diamètre de 82mm. Un très bon point pour une optique de paysage où l’ajout d’un filtre ND permet par exemple de donner un effet vaporeux aux cascades. C’est aussi intéressant pour de la photographie en zone polluée, l’ajout d’un filtre coupant les IR permet d’avoir des images plus pures du ciel nocturne. On peut aussi ajouter des filtres à l’arrière de l’objectif. Cependant, on reste dans une optique très particulière, ultra grand angle et ultra lumineuse. La formule optique est optimisée pour être compacte, on reste néanmoins sur un gros objectif qui n’est pas forcément passe partout. Construction L’optique est bien protégé contre les intempéries avec notamment un joint au niveau de la bague de la monture. Son pare soleil est amovible et bien maintenu en place par un bouton de verrouillage. Il a toute une panoplie de boutons directement sur le fût de l’objectif. Le bouton AF/MF est particulièrement bien placé et pratique lors de photographie nocturne. Attention cependant, ce n’est pas parce que l’objectif est en MF que la mise au point ne bouge pas après un redémarrage de l’appareil photo ou lors d'un touché accidentel de la bague de mise au point. Il faut impérativement contrôler sa mise au point régulièrement pour éviter d'avoir de mauvaise surprise une fois de retour derrière le PC. Sigma résout habilement ce problème de mise au point qui peut bouger. Le bouton MFL Lock permet de verrouiller la mise au point lorsque l’on est en mise au point manuelle. Une superbe idée, c'est à se demander pourquoi cette fonction n'existait pas avant? On retrouve un bouton personnalisable sur le fût. On peut par exemple l’attribuer pour la mise au point automatique sur les yeux ou autre selon votre préférence. Il y a un switch permettant d’avoir la bague d’ouverture crantée chaque 1/3 diaf ou sans clic (pour les vidéastes principalement qui ne veulent pas d'à coup dans leur film). Une autre nouveauté intéressante est un bouton permettant de verrouiller notre choix de réglage d’ouverture. Sans le verrouillage, avec la bague de diaf, on règle notre ouverture entre f1.4 et f16. Si l’on bascule sur A, on règle l’ouverture via le boîtier. Avec le bouton de verrouillage, on est soit bloqué avec le réglage de l’ouverture sur le boîtier entre f1.4 et f16, soit bloqué avec le choix de l’ouverture via le boîtier. C’est pratique pour éviter une perte de temps et une image ratée si la bague a malencontreusement bougé pendant le transport ou une fausse manip. Ça peut aussi être très pratique lorsque l’on ne peut pas accéder facilement au boîtier comme dans un caisson étanche pour des photos sous-marines. Le reste de la construction est dans les standards des derniers Sigma ART, une finition sobre est classe dans un plastique de bonne facture. La bague de mise au poin à une course très longue permettant un réglage précis de la mise au point (bien plus longue que les optiques Sony). Cette précision de mise au point est bienvenue pour la photographie nocturne pour faire le point sur les étoiles.   Qualité d’images Concernant la qualité d’image, c’est une optique qui sort du lot pour cette catégorie avec un piqué phénoménal dès la pleine ouverture même sur un capteur 61mgpx comme le a7rIV jusque dans les coins. Rien à voir avec le 20mm f1.4 HSM qui était un peu mou dans les angles à pleine ouverture. Il faudra attendre que d'autres testeurs fassent des comparaisons plus rigoureuse avec des chartes, ce n'est pas ma tasse de thé. Mais sur le terrain, le piqué est razor sharp comme disent les anglophones!   Flare, AC Si le soleil n’est pas loin du centre de l’image, du flare peut apparaître. C’est un problème qu’il est difficile d’éviter avec un grand angle aussi lumineux. Le Sony 24mm f1.4 s’en sort mieux mais pour quasiment 3x le prix du 20mm Sigma. Je n’ai pas réussi à mettre l’objectif en défaut avec les aberrations chromatiques. Même en contre jour et hors plan de netteté.   Coma Concernant la coma, il fait vraiment mieux que son prédécesseur en version reflex. Les coma sont inexistants même à pleine ouverture ce qui est une excellente nouvelle pour ceux qui voudrait photographier le ciel nocturne. Ci-dessous, deux recadrages 100% dans les angles à pleine ouverture (f1.4). Une fois avec le 20mm f1.4 GSM et une fois avec le 20mm f1.4 DG DN

HSM (on remarque un effet croix)

DG DN pas de coma (les traits sont du au filet des étoiles)

  On remarque aussi que le DG DN est aussi significativement plus piqué que le HSM. Contrairement au HSM ou je fermais à f1.8 ou f2 pour diminuer l'effet de coma, le vignétage et être moins mou. Le 20mm DG DN est au taquet dès la pleine ouverture , c'est vraiment une optique de choix pour de la photographie de voie lactée   Vignettage Pour le vignettage, il est présent à pleine ouverture, il devrait pouvoir être corriger facilement une fois que l'objectif sera reconnu par LR et les autres softs de traitement. Le vignetage disparaît totalement dès F2 Ce vignetage peut être visible lors d’assemblage de panorama, il faut penser à prendre suffisamment d’images pour avoir un recouvrement important et minimiser l’effet du vignetage et/ou fermer à F2 et plus. Les distorsions sont bien maîtrisée, dans l’ensemble, c'est une bonne optique pour faire des panorama.   Effet étoile Avec ses 11 lamelles de diaphragme, l’effet étoile est très marqué et esthétique dès que l’on ferme à plus de F8. L’effet est souvent accompagné d’un peu de flare de par la présence du soleil dans le cadre.   Image nocturne à main levée La très grande ouverture permet de faire des images à main levée avec très peu de luminosité. Très pratique si l’on ne veut pas avoir un trépied avec soi en permanence. Par exemple, ici les différents alpinistes en train de monter vers le sommet du Dom. Cependant, dans ces conditions de très faible luminosité, l’AF est un peu hésitante et oscille parfois autour du point. Dans des conditions lumineuses normales, le point se fait précisément et rapidement. L’AF est tout de même en retrait par rapport aux optiques Sony avec moteur linéaire.   Proxi Notez que la mise au point peut être faite à 23cm permettant de faire des images de proxi d’animaux montrant ainsi leur habitat ou des portraits particulièrement originaux. Cette mise au point rapprochée permet aussi d’amplifier la taille du premier plan avec l’effet grand angle.   Focus breathing Si on le compare à d’autres optiques du même calibre, le 20mm f1.4 DG DN a peut de focus breathing. C’est particulièrement intéressant pour les vidéastes mais aussi pour les photographes faisant du focus stacking.

superposition de map min et map max

  Conclusion En conclusion, pour moitié prix du 24mm f1.4 Sony ou moins cher et plus lumineux que le 20mm f1.8 Sony, le 20mm f1.4 DG DN s’inscrit comme un très bon choix. Après un gros lifting de volume et de poids par rapport à la version réflex (DG HSM), le DG DN optimisé pour appareil sans miroir est maniable et facilement transportable en ballade. Il a de nombreux verrouillages de la mise au point manuelle et de l’ouverture pour éviter toute surprise lors des déplacements ou pendant les prises de vues. C’est une optique qui est très spécialisée et qui nécessite un œil aguerri pour composer au mieux ses images. Ses performances sont excellentes avec un piqué qui décoiffe dès la pleine ouverture. Les aberrations chromatiques et la coma sont inexistants même à pleine ouverture ce qui en fait une des optiques les plus intéressantes pour la photographie nocturne. La mise au point moins de 23cm permet de faire de la proxi avec de jolis bokeh (pour un grand angle) permet de bien mettre en valeur des petits sujets. Le grand angle permet d'amplifier l'importance du premier plan par rapport à l'arrière plan, un jeu de perspective à utiliser lors des compositions des images. On peut noter quelques défauts inhérents à la grande ouverture et angle de l’optique. Le 20mm est assez sensible au flare lorsque le soleil est dans le champ de vision, le vignetage est aussi présent à pleine ouverture mais s’estompe rapidement en fermant (entre f1.4 et f2). L’AF en basse lumière n’est pas un foudre de guerre mais est-ce vraiment important pour une optique orientée paysage ? La construction est solide et sobre. Le pare soleil est amovible (pas forcément le cas pour les UGA ultra lumineux) et la lentille frontale pas trop bombée permettant le montage de filtre vissant plutôt qu’un système compliqué fixé sur le pare soleil (aussi possible de mettre des filtres à l'arrière). Il y a de nombreux boutons sur le fût pour passer en MF ou pour dé-cliquer la bague d’ouverture pour les vidéastes. Deux autres boutons de verrouillage font leur apparition avec le blocage de la mise au point en manuel focus ainsi que le blocage de la sélection de l'ouverture. Il y a aussi de nombreux joints d’étanchéité pour résister à toutes les conditions météos notamment la rosée du matin lors des time-laps. Un excellent rapport performance/qualité/prix dans la gamme des ultra grand angle lumineux pour de la photo nocturne, de paysage et d’archi. Cela peut aussi être une optique complémentaire pour faire des photos originales en jouant sur l’effet grand angle et faible profondeur de champs pour des portraits ou de la proxi.  

In conclusion, for half the price of the 24mm f1.4 Sony or cheaper and brighter than the 20mm f1.8 Sony, the 20mm f1.4 DG DN is a very good choice. After a drastic decrease in volume and weight compared to the SLR version (DG HSM), the mirrorless-optimized DG DN is versatile and easier to carry around. It has new feature buttons: manual focus and aperture locks to avoid any surprises when moving or shooting. It is a very specialized lens that requires a little bit of practice to compose good-looking pictures. Its performance is excellent, razor sharp at all apertures. Chromatic aberrations and coma are non-existent even at full open which makes it one of the most interesting lenses for night photography. The minimal focus point at 23cm allows to make proxy photography with nice bokeh (for a wide angle) that allows to highlight small subjects. The wide angle allows to amplify the importance of the foreground compared to the background, a perspective tool to use when you are composing your images.

We can note some downsides inherent to the large aperture and angle of the lens. The 20mm is quite sensitive to flare when the sun is in the field of view, vignetting is also present at full aperture but quickly fades away when closed a little bit (between f1.4 and f2). The AF in low light is not really fast and a little bit hazardous but is it really important for a landscape lens?

The construction is solid and sober. The sunshield is removable (not necessarily the case for ultra-fast and wide lenses) and the front lens is not too bulbous allowing the mounting of screw-in filters rather than a complicated system fixed on the sunshield (also possible to put filters on the back). There are many buttons on the barrel to switch to MF or to unclick the aperture ring for videographers. Two more buttons appear with manual focus lock and aperture selection lock. There are also many seals to withstand all weather conditions including morning dew during time-lapse for example.

An excellent performance/quality/price ratio for an ultra-wide and fast lens for night, landscape and architectural photography. It can also be a complementary lens to make original photos by playing on the wide-angle effect and shallow depth of field for portraits or proxy photography.

  Synthèse + Ultra grand angle très lumineux + pas de coma + pas d’AC + Possibilité de visser des filtres, pare soleil amovible + compact/léger par rapport à la version reflex (et au regard de sa forte ouverture) + prix très compétitif par rapport à la concurrence <1000€ + le grand angle le plus lumineux du marché (20mm f1.8, 14mm f1.8, 24mm f1.4) + tropicalisation + construction globale et boutons/switch sur le fût + verrouillage de la mise au point manuelle (MFL Lock) + effet étoile en fermant + possibilité de proxi + 1 nettoyage par an et garantie à vie avec Sigma Suisse   - AF hésitant et lent en basse lumière - optique spécialisée pour photographe expérimenté - vignetage visible à pleine ouverture (négligeable dès F2) - résistance au flare     Quelques images prisent avec le 20mm f1.4

Panorama 7 images, Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO6400, f1.4, 15sec

Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO100, f11, 1/100sec

Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO320, f11, 1/30sec

Panorama de 8images, Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO3200, f1.4, 15sec

Panorama de 6images, Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO800, f1.4, 1/10sec

Panorama de 2images, Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO400, f8, 1/25sec

Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO400, f5.6, 1/8sec

Blend 3images, Sony a7rIV,  Sigma 20mm f1.4 DG DN, ISO200, f4, 15sec

         
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Le gypse dans tout ses états

Avec mes débuts en spéléologie et mes cours d’accompagnement en montagne (AMM), j’ai découvert une nouvelle facette de notre monde au travers de la géologie. Cette vaste science s’intéresse notamment à la formation et à l’histoire des roches qui nous entourent. D’ailleurs une phrase d’un ami géologue en formation AMM, Manu, m’a particulièrement interpelée : « Tous les cailloux, comme chacun et chacune d'entre nous, sont des immigrés. En effet ils proviennent tous d'ailleurs. Leur voyage est le résultat de la conjonction de la tectonique des plaques et de l'érosion ». L’histoire des roches est passionnante, il faut juste apprendre à les écouter, lire entre leurs strates. Dans ce billet de blog, nous allons nous plonger dans un réseau *karstique qui a la particularité de s’être développé dans du gypse.

Le gypse se reconnait par sa friabilité et sa blancheur

Cette roche a une longue histoire qui nous fait remonter à des temps immémoriaux. Elle commence vers la fin du Trias, il y a un peu plus de 200 millions d’années avant notre ère. À cette époque le super continent, la Pangée, n’est pas encore fragmenté. La croûte continentale qui sera prise plus tard en sandwich dans la formation des Alpes est recouverte par une mer peu profonde en périphérie de l’océan Téthys. Le climat y est chaud, ce qui favorise la formation de la roche qui nous intéresse ici : le gypse. Il s’agit d’une évaporite, ce qui signifie que cette roche s’est formée par l’évaporation d’une eau surchargé en *sel dissout. Le gypse est un sel comme notre fameux sel de table (chlorure de sodium). Tout comme lui, il peut se dissoudre dans l’eau. L’eau a le pouvoir de casser le lien qui relie le Na (sodium) au Cl (chlorure). Ce pouvoir est limité et s’il y a trop de sel, la concentration de sel dissous atteint un maximum. Le mélange est alors saturé et le sel en trop reste solide.

Cristaux de gypse se formant sur les parois d'une mine. 

Des goutes saturées en sulfate de calcium s'éclaboussent au sol et forment ces cristaux

L'eau infiltrée dans la roche a une pression permettant de dissoudre le gypse. Une fois hors de la roche, la pression et la température diminue et le sel se cristallise contre les surfaces alentour.

Les cristaux de gypse ont une forme parallélépipédique (pas en pyramide comme d'autres cristaux)

A la fin du Trias, le climat chaud et les mers peu profondes commencent à s’évaporer. En évaporant l’eau de la mer, la concentration en gypse, plus précisément sulfate de calcium (CaSO4), augmente. L’eau devient saturée et le gypse repasse à l’état solide : il précipite et s’amoncèle avec le temps en strate sur les fonds marin. Après la formation de cette roche, au terme du Trias, le contexte tectonique se retrouve à nouveau bouleversé : une nouvelle période commence, celle du Jurassique qui s’étend de 200 à 145 millions d’années. Le climat est globalement plus chaud de 5 à 10 degrés par rapport à aujourd’hui. Le taux de CO2 est aussi dix fois plus élevé. Les dinosaures parcourent les plages, des libellules d’un demi-mètre survolent les marécages et la vie bas son plein dans les mers peu profondes en marge des continents. Au cours de ces millénaires, des générations d’ammonites, de crocodiles marins, coraux, oursins, poissons et crustacés se reproduisent, folâtrent, s’adaptent et finissent par mourir. Tout le calcium contenu dans les squelettes et les coquilles de crustacé s’accumulent en formant des strates par-dessus notre gypse. Tout ce processus de déposition va se poursuivre pendant la fermeture progressive de l’océan Téthys durant la deuxième moitié du Crétacé (145 à 65 millions d’année avant notre ère). La formation des Alpes commence avec la collision entre le continent Européen et *l’Apulie (un microcontinent au Nord de l’Afrique) au cours du Paléogène, il y a entre 65 et 23 millions d’années. Notre couche de gypse est prise en sandwich entre différents niveaux géologiques et va subir des déformations tectoniques. Avec l’érosion des jeunes Alpes, le gypse retrouve à nouveau la lumière du soleil. Cela après un incroyable périple souterrain de près de 200 millions d’années ! C’est alors que le processus de karstification peut commencer. Contrairement au calcaire massif, le processus d’érosion sera beaucoup plus rapide dans le gypse.

Bloc de gypse en cours d'érosion dans une gouille d'eau (on remarque la poussière de gypse érodée au pied de la structure)

Il est très friable et se dissous plus facilement dans l’eau. De part cette solubilité élevée, des galeries souterraines se forment facilement par dissolution avec l’infiltration de l’eau de pluie.

Un exemple de galerie formée par l'eau dans une couche de gypse

Tout un réseau en perpétuelle transformation se met en place.

Une stalactite de gypse en cours de formation (de type cristalline)

Des concrétions s’y forment et peuvent à nouveau disparaître pour se reformer plus loin: l’eau de percolation dissout du gypse par endroit et le fait précipiter ailleurs en stalactites, stalagmites, draperies, perles ou d’autres spéléothèmes dû à la différence de pression de l’eau, de la température et du taux de concentration. Les précipitations du gypse s’organisent en fins filaments et cristaux croissant goute après goute jusque à former une petite stalactite qui s’allongera avec le temps.

Le diamètre des filament que l'on aperçois est dans les 0.04mm soit la taille d'un cheveu.

goute après goute, les cristaux grandissent, s'entremêlent

goutte après goutte, la stalactite s'allonge

Parfois les structures semblent en équilibre, semblent défier la physique

Une fistuleuse est une concrétion tombant du plafond extrêmement fine et fragile

Des impuretés comme du pollen peuvent être pris au piège dans une concrétion

Naissance d'une stalactite. Petit à petit les cristaux de gypse se rejoignent et forme la base d'où goutera les futures gouttelettes

Le gypse se dissolvant plus facilement que le calcaire, les concrétions de gypse peuvent se former en une dizaine d'année alors qu'il faut en compter une dizaine de millier pour le calcaire.

Lorsque des goutes d'eau saturée tombe au sol, des perle des cavernes en gypse (pisolithe) peuvent se former

Ce sont des grottes dangereuses et très instables par nature. Il n’est pas rare que des pans de gypse complets collapsent et obstruent d’anciennes galeries.

Arche de gypse et bloc de gypse en cours de dissolution

Tout récemment d'ailleurs, un trou de 1m20 c'est ouvert sur une autoroute! Le gypse sous le bitume c'est dissout fragilisant le couches supérieures jusqu'à l'effondrement de la route. Par chance, le trou a été découvert avant un malheureux accident! Si l’on rajoute encore à cela l’activité humaine à proximité avec l’extraction du gypse à coup d’explosifs pour fabriquer du plâtre, les grottes deviennent carrément dangereuses ! S’y aventurer nécessite de bien connaitre le réseau, les périodes de minage en cas d’exploitation et de ne pas oublier les règles de base en avertissant en amont des personnes de confiance et expérimentées au secours.

Toujours s'aventurer dans une grotte avec des personnes expérimentées (ici Benjamin) et appliquer les règles de sécurité de base de spéléo

Même en prenant toutes ces précautions, il y a *des dangers objectifs : le caractère très instable et friable du gypse engendre des chutes de bloc imprévisibles. C’est en connaissance de cause et en adoptant un comportement qui minimise au maximum *les risques que l’on s’aventure dans les entrailles de la terre. Une fois arrivé à la hauteur de la nappe phréatique, tout semble figé. En l’absence de courant d’air, les petits lacs de la nappe agissent comme des miroirs.

Lac qui semble figé dans le temps d'un bleu azur. Notez les nombreux blocs rocheux tombés de la voute de la grotte.

Notez les différences de couleurs dans la roche du plafond. On distingue clairement les différentes "strates" typiques d'une roche sédimentaire/évaporite

Il devient presque impossible de différentier le reflet du fond du lac. Ce bleu cristallin, cette roche blanchâtre, ces reflets et cette pureté semblent presque irréels.

Eau de nappe phréatique formant un petit lac.

Par endroit, de fines plaques blanches flottent à la surface de l’eau.

Du gypse cristallisé sous forme de plaque en surface

En regardant plus attentivement, on discerne des petites dendrites, comme plein de petits flocons de neige accolés.

Plaque typique formée à la surface de l'eau

Vue rapprochée de plaque en formation

Cristallisation du gypse en surface formant des petits cristaux

Détail des cristaux

Il s’agit en faite du sulfate de calcium qui se recristallise à cause d’un taux de saturation en gypse trop élevé. Celui-ci se cristallise en formant ces petits flocons qui s’agglomèrent de plus en plus jusqu’à former de fines plaques.

Déchirement d'une fine plaque suite à une perturbation dans l'eau

Bulle d'air emprisonnée sous la plaque

Différentes densités de cristaux

Les plus gros cristaux font 0.15mm de long

Les plus petits cristaux font 0.04mm ce qui est ridiculement petit!

C’est un peu le même processus que les salières en bord de mer. Ces petites plaques flottent grâce à la tension superficielle de surface de l’eau. A la moindre perturbation, ceux-ci décrochent et coulent au fond de l’eau. Le même phénomène qu’a la fin du Trias, il y a plus de 200 millions d’années, se reproduit en quelque sorte! Quel privilège de pouvoir observer ces réactions chimiques si particulières à l’état naturel. Il n’y a pas que le cycle de l’eau avec son évaporation, ses pluies, ses glaciers, ses rivières et lacs, il y a d’autre cycle. Voir en direct une partie du cycle du calcium avec la roche sédimentaire formée il y a des millions d’années, son érosion par l’eau de pluie, ses reformations dans des stalactites, sa dissolution dans l’eau de nappe, sa recristallisation en surface et ses précipitations au fond des petits lacs souterrains me laissent pantois. Je retrouve mon âme d’enfant devant ce type de phénomène. J’en viens même à imaginer des cycles encore plus fous. Je m’imagine le cycle du méthane sur Titan, une des lunes de Saturne. Tout là-bas dans notre système solaire, du méthane liquide coule le long des rivières, forme des lacs, s’évapore et retombe sous forme de pluie de méthane. Je ne verrai probablement jamais ce cycle d’hydrocarbure mais la vue de ce cycle du calcium suffit largement à attiser ma curiosité. Cela me motive à découvrir encore plus de trésors cachés. Toutes ces beautés naturelles sont très fragiles et doivent être préservées. En plus de la destruction de ces joyaux par l’exploitation humaine du gypse pour la fabrication de plaque de plâtre, s’ajoutent les déprédations des visiteurs peu scrupuleux. Ces grottes peuvent pour certains être facilement accessibles. Malgré le risque élevé et le danger omniprésent, des curieux et curieuses s’aventurent parfois dans ces grottes à la recherche de sensations fortes. Malheureusement, un manque de formation, d’éducation ou même parfois un coté narcissique et d’égo détruisent ces lieux. On peut retrouver des bougies, des emballages plastiques et d’autres ordures transformant des grottes en décharges.

Emballage de "ShupaShups" en plastique trouvé dans une grotte naturelle de gypse

Une fleur en plastique "décorant" la grotte

On y trouve même parfois des foyers qui noircissent les parois de la grotte, enfument les chauves-souris ou même d’autres personnes pouvant se trouver ailleurs dans la grotte.

reste de foyer

On y trouve aussi des amoncellements de pierre formant des cernes ainsi que des déjections. On y retrouve aussi des graffitis réalisés à la bombe ou à la suie d’acétylène contre les parois marquant le passage de personnes en manque d’ego avec des noms, des dates et même des messages religieux, d’amour et de haine.

Merci Frank

Merci Claudy Moix

Merci Waser

L’histoire de l'image ci-dessus: Il y a 130millions d'années, l'océan Téthys se forme, des animaux y vivent et y meurent augmentant le taux de sulfate calcium dans l'eau. Il y a 80millions d'années, l'océan Téthys commence à se refermer, l'eau s'évapore et le gypse se cristallise au fond de l'océan et forme des couches. Il y a 50millions d'années, le fond de l'océan Téthys se fait complètement écraser et expulser, pris en sandwich entre la plaque tectonique Africaine et Européenne. Les déformations dessinent les plissements que l'on voit. Il y a 20mille ans, des glaciers, des infiltrations d'eau dissolvent le gypse créant des grottes et des éboulements Il y a 30ans, des humains narcissiques indiquent leur passage sur une oeuvre d'art, une fresque naturelle façonnée depuis une centaine de millions d'années   Je suis bien désolé de finir sur cette note en demi-teinte mais il m’est impossible de parler des beautés de la nature sans relever le coté malsain de l’humain. Il y a malheureusement un grand manque de sensibilisation à cette problématique et j’espère apporter une petite pierre à l’édifice par cet article. Pour ne pas en rester là, je pense organiser un nettoyage de quelques cavités pour leur rendre leur aspect naturel (en m’assurant qu’il n’y ait plus de chauve-souris en hibernation ou en train d'élever leurs portées).

Le grand rhinolophe, une espèce rare et sensible habitant pouvant habiter dans les grottes/mines de gypse

Et pourquoi ne pas sensibiliser les jeunes en organisant des conférences dans les classes d’école ? Un grand merci pour votre lecture, ne cessez jamais de vous laisser émerveiller par la nature et laissez là aussi naturelle qu’elle est 😊     Un grand merci à Antony, Géologue en formation pour sa relecture et nombreuses précisions et complément sur la partie hydro-géologique de l’article. J’ai malheureusement dû simplifier beaucoup de détails techniques. Cependant, vous trouverez quelques précisions dans les notes et définitions ci-dessous : * karstique : ‘’Le karst est une structure géomorphologique résultant de l'érosion hydrochimique et hydraulique de toutes roches solubles, principalement de roches carbonatées dont essentiellement des calcaires.’’ Source *Spécificité des différents ères cités : Trias : 250 à 200 millions d’années avant notre ère. Le climat est particulièrement chaud. La Pangée n’est pas encore fracturée. Plus de précision  Jurassique : 200 à 145 millions d’années avant notre ère. Le climat est globalement plus chaud de 5 à 10 degrés par rapport à aujourd’hui. Le taux de CO2 est aussi dix fois plus élevé. Plus de précision Crétacé : 145 à 65 millions d’années avant notre ère. Le climat est moins chaud qu’aux périodes précédentes (Trias, Jurassique). Durant la deuxième moitié de cette période, l’océan Téthys se ferme progressivement. Plus de précision Paléogène : 65 à 23millions d’années avant notre ère. Le climat est toujours chaud. Les Alpes commencent à se former avec la collision entre la plaque Eurasienne et Africaine au début de cette période. Plus de précision *Mer ou Océan ?: Pour faire simple, on parle d’océan quand il y a une croûte océanique conséquente et de mer lorsque l’eau recouvre surtout de la croûte continentale (ex : la mer Méditerranée). *sel : Le terme ‘’sel’’ regroupe ici un assemblage d’atomes ou molécules qui peuvent se retrouver sous forme ‘’aqueuse’’, c’est-à dire dissout dans l’eau et combiné avec les molécules H2O qui le compose. *Risque: En gestion du risque en montagne, on parle du risque résiduel qui est le résultat d’une division entre les dangers et le comportement des gens vis-à-vis de ce danger. En ce sens un sentiment de sécurité dû par exemple à des années de pratique sans accident peut conduire à des comportements dangereux. Cela peut être appelé ‘’le paradoxe du sentiment de sécurité’’, puisqu’il conduit à un comportement dangereux pour soi-même et les autres, secouristes compris ! Il y a un autre type de sentiment de sécurité généré par le manque d’expérience et d’année de pratique. Or la spéléologie et les sports de montagne sont surtout des affaires d’expérience et d’années de pratique. Au final, ce qui permet d’adapter notre comportement au mieux, c’est la conscience du danger et encore plus des conséquences d’un accident) *Danger objectif ou subjectif ?: si on peut causer la déstabilisation d’un bloc, d’une avalanche ou tomber, c’est un danger subjectif, vue que l’humain est la cause déclenchante de l’événement qui peut générer l’accident. Si la déstabilisation n’est pas causée par l’humain ou autrement dit, si l’humain n’a pas le contrôle sur ce déclenchement, on parle de danger objectif. Là, les seules stratégies, c’est d’éviter complètement le danger ou sinon au moins réduire le temps d’exposition.
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Entre le fond de l’océan et le sommet des Grisons

Étant déjà dans le canton des Grisons pour la quête du grand tétras, je profite de l’occasion pour visiter ce beau pays en compagnie de Lisa qui me rejoint pour les 3 derniers jours. Au programme : voir le plus haut sommet des Grisons, le Piz Bernina. C’est d’ailleurs le seul 4000 du canton. Un sommet qui est sur la liste des 4000 encore à réaliser. On entre dans la vallée de Morteratsch qui nous fait voyager dans le temps. Des panneaux indiquant la position antérieure du glacier bordent le chemin. Ces panneaux nous permettent de nous rendre compte du gigantisme du glacier d'en temps. La fonte du glacier est impressionnante, la perte de volume donne le vertige. Se dire que lors de la deuxième guerre mondiale, un seul glacier recouvrait la vallée alors que maintenant, il est fractionné en une multitude de petits glaciers fait mal au cœur. C’est aussi l’occasion d’étudier l’évolution d’un milieu mis à jour par la fonte du glacier. C’est un milieu pionnier, les dix premières années avec quelques herbes et mousses non vasculaires qui arrivent à pousser dans le limon. Puis, après 30 ans, les premiers arbres, tels que les mélèzes et les saules commencent à s’implanter avant d’être progressivement remplacés par une forêt d’aroles qui est le climax de cette zone. Le chemin balisé s’arrête au panneau 2015. De là, le glacier a tellement reculé qu’il n’est pas possible de le voir. D’ici, on aperçoit uniquement un énorme pan de roche qui n’était pas du tout visible avant les années 2000. Cette paroi rocheuse fait passé 100m de haut et a résisté à la force d’abrasion du glacier. Ce type de topologie s'appelle un verrou glaciaire car il contraint le glacier à contourner l’obstacle. A l’ombre de cette paroi, agonise un bout de glacier complètement détaché du glacier principal. Il semble y avoir une grotte de glace, malgré les panneaux interdisant l’accès à la zone pour des risques de chutes de pierre, nous nous rendons dans cette petite grotte. Celle-ci fait à peine une dizaine de mètres de long et ne semble pas particulièrement intéressante. C’est sans compter sur les yeux aguerris de Lisa qui sait trouver de la beauté dans les recoins les plus discrets. Dans une petite fissure du glacier, du givre a poussé et grandi. Ce microcosme est incroyable, si on s’y plonge, on s’imagine en train de se balader sur une planète glacée avec d'énormes stalactites et stalagmites de toutes parts. Un paysage surréaliste et glacial. La difficulté pour capturer la beauté de ce monde miniature est de taille mais je tente de vous la partager au mieux. On sort ensuite rapidement de cette zone qui est particulièrement instable. De beaux rochers dévalent la pente de la moraine. En moins de 10 minutes, des rivières se sont formées et coulent le long du glacier. On décide de marcher jusqu’au pied du glacier. On gravit les 100 m du verrou glaciaire en restant le plus éloigné des bords dangereux du vallon. Une fois au sommet du verrou, on distingue une grotte de glace sur le côté du glacier. Celle-ci est bien plus grande que la première. Dans la partie centrale, une rivière coule sous la glace. Il y a même quelques petites cascades. Au-dessus des cascades, la glace est marquée par un beau motif d’écaille. Plus bas dans la grotte, le sol est toujours glacé mais pas de manière uniforme. Ce sont d'énormes cristaux de glace reliés entre eux. Fragile par endroit, il a supporté mon poids la majorité du temps. Il reste encore une troisième partie à cette grotte, plus cachée. Il faut se faufiler sous la glace en remontant la rivière. Une petite cascade sous glaciaire cachée jaillit du glacier. On se remet ensuite en route pour aller jusqu’à ce qui semble être la grotte de glace principale du glacier. En arrivant sur place, il s’avère que c’est en fait un champ de crevasse. Sans matériel adapté, nous n’irons pas plus loin. De là, on aperçoit le fameux 4000 des Grisons, le Piz Bernina. On croise d’ailleurs aussi quelques skieurs, sur leur chemin du retour. Une bien belle découverte que cette vallée qui est très accessible avec une gare au début de la vallée et un chemin allant jusqu’au fond. Cependant, on y est allé en basse saison (fin avril). En été, selon les photos satellites, ça doit être l’enfer.   Pour la suite du programme, il me tenait à cœur de visiter une arche de pierre assez peu connue dans la région. C’est une marche géologique, c’est-à-dire qu’un parcours a été défini avec différents marquages pour expliquer la géologie locale. Malheureusement, ce parcours se fait en juin lorsque toute la neige a fondu. Nous avons donc loupé la plupart des marquages et donc l’histoire géologique du lieu. Il s’agit en fait de la plaque océanique autrefois au fond de l’océan de la Téthys qui se retrouve au sommet de ce massif montagneux. On peut donc y trouver des faucilles dans les roches. Nous n’en verrons malheureusement pas à cause de la neige. D’ailleurs, nous avons aussi failli ne pas voir l’arche tout court. Le chemin ne passant pas vraiment à côté de l’arche, c’est en se perdant un peu de nuit en raquette que l’on tombe dessus un peu par hasard. Cette arche vient d’ailleurs aussi du fond de l’océan. Elle est faite en dolomie, une roche sédimentaire qui se forme à l’abord des abysses. On installe le camp à côté de l’arche pour la nuit et l’on profite d’un ciel encore un peu dégagé pour tenter quelques images nocturnes. Le centre de la voie lactée et la constellation du scorpion pointent juste le bout de leur nez juste avant d’être complètement obstrués par le nuage. Cette couche nuageuse va s’intensifier durant la nuit et nous nous réveillerons le lendemain dans une ambiance totalement différente. Entre blizzard, jour blanc et nuage bas. Constitué de dolomine, elle était au fond de l'océan de a Téthys il y a 100 millions d'années. Puis, lors de l'érection des alpes, elle a été prise en sandwich entre la plaque Eurasienne et Africaine et c'est retrouvée propulsée hors des eaux. Puis avec l'érosion, voila que ces deux morceaux de dolomie sont en équilibre, en appuis l'un contre l'autre. Le surnom de cette arche est « der Kuss » qui veut dire, le baiser. Comme si ces deux blocs de dolomie se faisaient un bisou depuis la nuit des temps.  On profite de cet endroit symbolique pour aussi se faire un petit bisou :) On attend ensuite que le temps se calme avant de se remettre en route pour rejoindre la voiture. Au début, le ciel était par endroit dégagé et les ambiances sympas. Mais plus l’on descendait vers la plaine plus le temps devenait maussade. On finira sous la pluie, trempée jusqu’au slip. Sur la route pour rentrer au pays, on s'arrêt au bord d'un petit lac grisonnais, le Crestasee. Les relfets dans ce lac sont assez magique. Deux petits arbres en fleures semblaient nous appeler de l'autre coté de la berge. Il y a aussi un jeu de racine tortueux. Puis, il a fallut se résigner à rentrer. Il n'y a pas à dire, les Grisons renferme tout de même de magnifiques coins!
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Tétras Lyres

Je ne fus pas aussi assidu que les années précédentes pour mon suivi de la place de chant habituelle. C’est en partie dû à une semaine dans les Grisons sur les traces du grand cousin du lyres, le grand tétras. J’ai tout de même pu passer quelques nuits à côté de ces poules des landes. Le premier affût fût plus un repérage avec un affût positionné particulièrement loin de la place de chant afin de repérer si les habitudes de parades ont changé. Il s’avère que les places ne changent que peu au fil des ans. Je profite tout de même de l’occasion pour prendre quelques images lointaines mais le but principal de la sortie et de repérer le futur emplacement de l'affût afin d’avoir un angle de vue intéressant. Comme je remonte le soir même, je laisse tout l'affût monté sur place ainsi que le matelas et le sac de couchage. En remontant le soir vers 16h, je déplace l’entièreté de l'affût vers le nouvel emplacement. C’est en me couchant dans l'affût que je me rends compte que le point de vue particulièrement bas m’empêche de voir certaines zones de la place de chant et que quelques arolles me bloquent la vue. Il est de toute façon trop tard pour changer d’emplacement car le soir commence à tomber et des femelles ou des mâles particulièrement actifs pourraient commencer à s’approcher de la place. La soirée reste très calme mais au petit matin, les tétras sont bien actifs. Un de males s'approche de ma ligne de mire alors que le soleil n'est pas encore levé. On remarque sur ces images que ce mâle c'est déja bien battu, il lui manque quelques plumes autour de l'oeil. Lors des combats, ils essaient d'attaquer le point faible, à savoir les yeux! Dans leur répertoire de chant, ils ont un gloussement. Ce gloussement raisonne dans leur coup bien épais comme on peut le constater dans l'image ne dessous. Ils émettent aussi des chhhou-chouuchheeee en sautillant et en donnant un battement d'aile Avec le rehaussement des températures au petit matin, de la buée apparait dans l'objectif... Je n'ai malheureusement pas pris le petit corps de chauffe pour éviter la condensation. Ca donne des images un peu féerique :) Je démonte l'objectif du boitier pour essuyer la buer pour prendre quelques images maintenant que la lumière est belle Puis, certain individus quittent la place de chant pour se nourrir et chanter au sommet des mélèzes Comme je le craignais, les occasions pour mettre en image les danseurs sont assez rares. C’est dommage, car les conditions météos sont très changeantes entre une belle lumière, du jour blanc et même de la neige! Il joue à cache-cache Puis la neige s'abbat sur la place de chant. Des ambiances juste magique! J’entends aussi quelques femelles glousser aux alentours de la place de chant mais elles ne se montreront pas de la matinée. Je cache l'affût au pied du même arolle que les années précédentes et je laisse les courtisans vaquer à leurs occupations pendant que je pars à la recherche de son plus grand cousin, le grand tétras. Après 4 jours d'affût consécutifs dans les forêts alpines grisonnes que je détaillais dans cet article, Lisa me rejoint. On part en vadrouille la fin de la semaine découvrir quelques paysages de l’est de la Suisse avant de revenir par le Valais. Lisa, intriguée par la description que je lui fais des parades des tétras, est bien intéressée à découvrir ce rituel printanier. On embarque un affût un peu plus grand (tragopan V5) et l’on se met en route. On décide de ne pas prendre les raquettes car la neige semble avoir passablement fondue. C’était sans compter sur les 50 derniers mètres de dénivelé qui nous prendront autant de temps à faire que les 450 m précédents. On s’enfonce dans la neige détrempée jusqu’aux anches. Petites chaussures et mes jeans de ville complètement blek (jargon local pour dire mouillé jusqu’au slip). Résultat, ces derniers 50 mètres nous donneraient « presque » l’illusion que d’avoir les raquettes sur le dos en cas de rencontre avec la neige, peut s’avérer utile. Mais bon, j’ai bien dit « presque » :P Il est temps d’installer l’affût. Celui-ci étant plus grand pour pouvoir y passer à deux (en se serrant), il nous faut terrasser un peu la neige. Quelques coups de pelle plus tard, on a une belle plateforme pour installer l'affût. Contrairement à la semaine dernière, nous sommes un peu en contrebas mais la vue sur la place de chant devrait être optimale si tout se passe comme prévu. Vite en slip dans l'affût pour enlever tous ces habits qui commencent à geler. Se blottir au fond du sac de couchage pour remonter la température corporelle et chauffer au mieux. Un tétras chante au loin, probablement perché dans un arbre. Il n’est pas vraiment possible de le voir malgré un rapide scan aux jumelles. Un mâle chanteur attirant les autres, d’un coup, venant de nulle part, voici que 3 mâles atterrissent dans un grand fracas d’ailes au milieu de la place de chant. Un instant magique, nous voilà au cœur de l’action. Les parades et les confrontations s’arrêtent assez vite, ils finissent par rester muets sur la place de chant en attendant que la nuit tombe. Une fois la nuit bien installée, ils décollent pour aller dormir dans les arbres en bordure de clairière. Un moment hors du temps qui promet un matin bien mouvementé car il est assez rare que les coqs soient actifs le soir. C’est aussi pourquoi il faut monter relativement tôt la veille dans l'affût pour éviter de déranger les parades du soir ! Au petit matin, les petits chhhou-chouuchheeee et gloussements d’intimidation nous sortent de notre sommeil. Les voilà au rendez-vous au petit matin sur la place de chant. Il fait encore bien sombre et l’on n’arrive pas à les distinguer dans la neige mais ils sont vraiment à côté, c’est sûr ! Les 4 mêmes coqs défendent leur petit bout de territoire. Deux sont particulièrement revendicateurs et aiment bien s’envoyer dans les plumes. Un autre parade bien plus proche de nous, lors d’un de ses passages, on a même entendu le frottement de ses plumes contre la toile de l'affût. Une proximité exceptionnelle, son chant résonne et s’amplifie à l’intérieur de l'affût. Un spectacle mémorable qui fait pétiller les yeux marrons de Lisa ! « Pour une première, je me sentie si privilégier de vivre de tels instants de spectacle aux abords de la place de chant. Au moment d’entendre les gloussements de ce mâle se rapprocher doucement de nous, puis d’entendre ses plumes frotter contre l’affût, je me sentie tel un petit chenapan. Cachée là, derrière son léger bout de tissu, à guigner les oiseaux dans leur intimité, sans qu’ils aient l’air de se soucier de notre présence. Un spectacle de la nature qui me laisse émerveillée, suspendue dans le temps. » Les gloussements des femelles aux alentours de la place de chant se font de plus en plus présents. Puis, incroyable, une femelle passe à droite de l'affût à moins de 2m et remonte toute la place. Les coqs chantent de plus belle ! Puis, c’est deux mètres à gauche de l'affût qu’une poule passe.   Quelques minutes plus tard, voilà que la troisième fait son apparition sur la place. L’intensité des parades et des combats des mâles augmente exponentiellement.   Elles se tiennent toutes les trois au beau milieu de la place de chant pendant que les mâles tentent de les impressionner en leur tournant autour. Je m’imagine même peut-être mettre en boîte mon premier accouplement de tétras !   Une des femelles se montre particulièrement agressive envers les autres, ça doit être la matriarche. Si un mâle semble un peu trop s’intéresser à une autre, une petite crise de jalousie surgit. La femelle, comme les mâles, met les plumes de son croupion en lyre et se met à chasser les autres femelles. Vraiment cocasse de voir ce comportement. Malheureusement, aucune femelle n’accepte les faveurs d’un mâle, elles partent toutes doucement sur l’extérieur de la place de chant avant de s’envoler vers la forêt. Quelques minutes plus tard, une quatrième femelle fera son apparition sur la place faisant remonter le taux de testostérone des mâles mais le résultat final sera le même.   Le soleil ne restera pas bien longtemps sur la place de chant. Les nuages reprennent le dessus et l'ambiance générale passe au jour-blanc   Maintenant que toutes les femelles ont quittées la place de chant, les mâles s'en vont aussi un à un. Certains chantent encore quelques strophs et se font une petite toilette. L'un d'eux nous montre même son popotin en lyre. On attend avec Lisa dans l'affût bien deux heures que l’activité sur la place de chant soit totalement terminée pour éviter de déranger les tétras en bordure de la place de chant. On remet les habits trempés et gelés de la veille et l’on plie l'affût. On a vraiment eu un spectacle particulièrement intense cette matinée là ! Bien heureux d’avoir pu partager ce moment de vie avec Lisa. Maintenant, il est temps pour moi d’aller servir sous les drapeaux. Presque trois semaines d'armée. Je laisse tout de même l'affût sur place ce qui m’obligera à venir rendre visite aux tétras une dernière fois de la saison.
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Le grand tétras, l’enchanteur des forêts

Le printemps pointe le bout de son nez. Les crocus transpercent la fin couche de neige restante et les oiseaux chantent leurs amours à qui veut bien les entendre. Il est temps de quitter la place de chant des tétras lyres pour rendre visite à son grand frère,  le grand tétras. J'y avais consacré beaucoup de temps l'an dernier dans le cadre du projet de la bourse Iris. Le grand tétras était la cerise sur le gâteau du reportage sur les galinacé des Alpes. Le plus grand, imposant et impressionnant de nos poules alpines m'avait un peu laissé sur ma faim. Deux semaines de repérage et d'affut pour au final une seule image. Mais quelle image! Pour ceux qui ne l'ont pas vue, c'est par ici https://apvl.ch/grand-tetras/ Les tetraonidés ont leur habitude. Le repérage et l'analyse de leur comportement est la partie la plus fastidieuse et chronophage en photographie naturaliste. Mais une fois faites, le gros du travail n'est plus à faire. Je profite donc de 4jours de congé pour m'éclipser dans les grandes étendues forestière des alpes grisonnes. J'y retourne un poil plus tard que l'an dernier en espérant tomber pendant la période la plus active des pariades. La neige est aussi bien moindre que l'an dernier. La plupart des routes et chemins sont dégagés facilitant grandement l'accès. Arrivé sur place, pas une minutes à perdre, je prépare l'affût,  le matelas, le sac de couchage et le materiel photo. Une fois le tout empacté, je retourne sur les traces de l'an dernier. Les premiers indices sont prometteurs. Je croises des crottes cylindriques caractéristiques du grand tétras. Puis, c'est l'effroi! Au détour d'un contour, je vois la forêt ratiboisée. Une coupe vient d'avoir lieu. La sciure est encore bien fraiche et l'odeur du bois coupé est bien présente. La forêt a été clairsemée, il reste des arbres ici et là. C'est le biotope parfait pour le grand tétras mais pourquoi procéder à un tel chantier pendant la période de parade du tétras ? Est-ce que les tétras ont été derangé et ont quitté la zone? Je crains que le reperage de l'an dernier ai été vain. Il se fait déjà tard, je réfléchirai à la question une fois dans l'affût, j'auraisplus de 52heures à attendre. Je monte la tente, gonfle le matelas et sort le sac de couchage. Une fois l'appareil photo en place, j'attend patiemment assis sur ma chaise de camping. La nuit tombe et j'entend les gloussements des tétras qui résonnent dans la foret. Soulagé et heureux de les entendre, je tente des les apercevoir à travers les petits fenêtres de l'affût. Malgré leur gloussement et le bruit assourdissant de leur vol maladroits, je ne les vois pas. La nuit est maintenant bien là, je ne distingue plus les cailloux de l'herbe en face de moi. Juste avant de jetter l'éponge et de me glisser au fond du sac de couchage, j'entre aperçoit la silhouette d'un tétras atterissant sur la pointe d'un mêlez. Voila donc où ils se cachent en soirée, ils restent au sommet des arbres à déguster des bourgeons de mêlez bien juteux prêt à éclore. De temps à autre, d'un mouvement de tête du bas vers le haut, les grand tétras affirme leur presence d'un gloussement du sommet de leur garde manger. Une fois le stock de bourgeons de mélèze épuisé, le tétras s'envole pour s'affairer à un autre arbre. J'observe ce spectacle de longues minutes durant avant de me laisser aller a des rêveries au chaud dans mon sac de couchage. Le froid me réveille a quelques reprise pendant la nuit, environ -3°C mais un environnement très humide du aux pluies de la veille. Quelques flocons se sont même deposé sur la tente pendant la nuit. A 5h20, ce sont les gloussement des grands coqs qui m'extirpent de mon sommeil. Des petits "gloupe" comme si des goutes d'eau tombaient dans une flaque. La foret semble comment emprise de magie avec cette ambiance matinale surealiste. C'est avec une grâce comparable à une planche de bois que je pivote sur le coté de mon matelas gonflable et que je me hisse sur la chaise de camping pour scuter les tétras. Il fait encore bien trop sombre pour discerner quoi que ce soit mais c'est un moment magique ou je me laisse bercer par gloussement. Il y en a de plusieurs sortes: les gloupes, les chants de parades ainsi que les petit gloussement des femelles. Il y a du beau monde qui s'active dans le coin. Au minimum quatre mâles chanteurs et deux femelles. La coupe de la forêt ne semble pas les avoir traumatisé au point de changer de parcelle de chant. Plus facile a entendre qu'a voir mais voici que le coq de haut de la pente descend jusqu'en bordure du territoire du coq du bas de la pente. Les deux se retrouve sur la délimitation fictive de leur territoire et échangent quelques coups de bec pour bien se mettre d'accord sur la frontière. Ce petit règlement de compte c'est malheureusement passé en dehors du champ de vision de l'appareil photo mais j'ai pu immortalisé leur allé et venue. Ils continuent ensuite à chanter à l'abris des regards caché par les sapins. Le spectacle musical continue jusqu'au premier rayon du soleil. Le coq du haut profite de l'occasion pour chanter dans une clairière plus degagée pour mon plus grand bonheur.   Il effectue même de petits vol-planné pour bien affirmer sa présence! Il se met même en évidence sur une souche fraichement coupée lors de la dernière éclaircie de foret Je profite aussi de la lumière suffisante et de la haute résolution de mon appareil photo pour faire des gros plan de ce magnifique oiseau. On peut distinguer cet incroyable effet de moiré sur son plumage! Parfois il tend la tête droit au ciel lui donnant un air un peu cocasse. Avec cette position, sa petite barbiche est particulièrement visible. La foret se calme, l'hystérie du petit matin laisse place au bruit du vent sifflant à travers les épines de sapin. Les mâles partent se reposer en foret. Les femelles probablement aussi mais elles sont si discrète que je n'en ai pas aperçu. Ce calme dure pendant toute la période la plus chaude de la journée.  Les petits flocons posé sur mon objectif photo se sont maintenant transformé en petite gouttelettes d'eau. Vers les 16h, les mâles les plus au taquet reprennent du service. J'ai pu en entrapercevoir un à travers les branchages de la foret depuis l'affût. Un moment assez irréel avec cette lumière de journée qui fait scintiller l'image. Le soir approchant, les tétras reprennent de la hauteur pour grignotter des bourgeons de mêlez. Evidement, ils choisissent des arbres qui sont forcément caché par d'autres depuis l'affût. Après bien 2 heures de picorage de mêlez, le mâles semble intriguer par la présence d'un autre mâles.  Il s'envole pour atterir pas loin de l'affût,  derrière,  dans un sapin. De là,  il commence son petit bâle au sommet de l'arbre pour impressionner le rival. Après quelques coup de gueule, il se remet à picorrer des jeunes pousses de sapin. Une fois la nuit bien tombée, les mâles descendent au sol pour parader. Malheureusement, il fait bien trop sombre pour y voir quoique ce soit. Je profite de ce concert comme d'une berceuse. La nuit est bien plus douce et agréable que la précédente. Les tétras, réglé comme une horloge Suisse, me réveille à nouveau à 5h27. Pendant que je passe du matelas à la chaise enroulé dans mon sac de couchage tel une chenille, les femelles tétras motives les mâles du haut de leur arbres. J'imagine qu'elles sont dans les arbres... ce que je sais, c'est qu'elles font tourner la boule au mâles. Moi qui espérer que le male "du haut de la pente" se montre en spectacle devant l'objectif, quenini. Celui-ci attiré par les gloussements de madame descent parader en contre bas. Mais où est le mâle "d'en bas de la pente"? Il n'a pas l'air d'être là ce matin. Celui de haut parade au pied de l'arbre d'où émane les gloussements. Je tente tant bien que mal de me contorsionner pour lui tirer le portrait mais ce n'est pas bien évident. L'affût n'est pas placé pour photographier cette région et de plus, pleins de branchage bloque la vue. Après bien deux heures à faire la coure, la belle n'en demore pas, elle ne se devoile pas. Par contre, voila que le mâle de bas de la pente reviens dans sa zone. Le face à face d'intimidation ne suffit pas, ils en viennent aux pattes et au bec! Les deux se volent dans les plumes et disparaissent en contre bas dans un brouaha de battement d'ailes. Ça n'arrête pas, quel raffut,  quel remu ménage. Je m'en viens même à avoir de la peine pour eux, j'espère qu'il ne se blessent pas! J'ai presque envie de sortir de l'affût pour les séparer,  leur dire que le jeu en vaut pas la chandelle? Mais pour eux, ca compte vraiment. Montrer à la dame au sommet de l'arbre qui est le plus fort des lieux. Qui sera le plus digne d'assurer la descendance. Car ce qui est certain, c'est que la survie pour les générations futures sera ardue. Depuis 1970, la population Suisse de grand tétras dans les alpes à fondue de deux tière passant de 1500 individu à moins de 500 aujourd'hui.  La tendance n'est malheureusement pas en train de s'inverser, le morcellement du territoire par l'homme et la destruction des vieilles forêts pousse la population du plus grand galinacé de nos Alps dans ses derniers retranchement. Pourtant, tout n'est pas encore perdu, ici, le nombre d'individus permet encore de maintenir l'espèce contrairement au Jura ou les populations sont tellement diminuées par la pression humaine qu'il en devienne littéralement fou. Ils perdent leur comportement naturel, paradent toute l'année et deviennent agressif envers les humains. Finalement,  en pensant à la situation du tétras en Suisse, je me sens privilégié de pouvoir assister a ce combat entre deux coqs. Puis, les battements d'ailes se taisent. Je scrute en plissant les yeux à travers les filets de l'affût. Là, sur la gauche, je le vois! Le tétras d'en haut qui remonte à toute allure le talus coursé par le tétras du bas. Une scène digne de la race d'hereins. Le male avoue sa défaite et remonte dans son territoire avec une touffe de plumes en moins sur l'aile. Le tétras du bas est maintenant seul maître des lieux et continue a parader pour impressionner la dame. Mais, de ce que j'en ai vu à travers les branchages bien épais, il ne me semble pas que madame aie succombé aux faveurs du vainqueur ! Tout n'est peut-être pas encore perdu pour le tétras du haut? Après ce moment fort en émotions,  la forêt retrouve son calme de longues heures durant. De quoi commencer à écrire le début de l'article du grand tétras dans l'affût sur mon smartphone. Et voila que j'ai ratrappé le présent. ha, encore une chose, je crois que j'ai du mettre l'affût pas loin d'un nid de fourmis car je suis en train de me faire envahir. Elles sont devenues hyperactif avec ce soleil de midi! J'enregistre le texte, j'éteins le téléphone et j'espère continuer la suite de ce texte demain avec de nouvelles anecdotes de terrain croustillantes :) Le lendemain, le tétras du haut était au rendez-vous. Paradant d'abord sur les hauts, invisible derrière les arbres. La luminosité augmentant, il se montre sur la pente dégagée, juste devant l'affut. Ses roucoulement se font en donnant de violents coups de tête répétés Il fait sa toilette et manque quelques pousses de sapin. Quelques dizaines de minutes avant que le soleil ne perce la canopée, il descend sur la route, parade un court instant avant de disparaitre dans les bas fond de la foret pour le reste de la matinée. Un spectacle qui restera longtemps encré dans ma mémoire. 4 jours incroyable à suivre cette espèce qui incarne nos vieilles forets, plus de 52h d'affut! Une espèce mystérieuse et emblématique qui me fond vibrer au plus profond de mon être!
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Aletschhorn 4194m

Voilà que l’hiver se termine et que l’on n’a pas fait un seul 4000 de la saison ! Il faut dire que la neige n’aura pas été au rendez-vous. Pas mal de neige en tout début d’année mais pas encore assez froid et stable pour faire les sommets. Puis, il a plu à plus de 3300m vers Noël rendant impossible toute ascension. Ces conditions ont rendu le manteau neigeux très instable avec des couches très dures et d’autres très friables dû à un gradient de température élevé. En bref, il n’y a pas vraiment eu de période propice cette année mais on s’est quand même motivés pour tenter la revanche de l’Alteschhorn. Revanche car nous l’avons tenté il y a 2ans et avons dû avorter l’expédition en raison du danger d’avalanche. Vous pouvez lire le billet de blog retraçant l’historique en cliquant ici.

Contrairement à la dernière fois où l’on a traversé tout le glacier d’Aletsch du Langletscher en passant par la Konkordiaplatz, cette fois on a opté pour une approche plus directe : l’arrête sud-ouest. C’est une arrête cotée en AD (assez difficile), la cotation la plus élevée que l’on ait tenté jusqu’à maintenant ! Habituellement les alpinistes montent par ce côté ou par l’arrête est (peu difficile) et redescendent par la même voie. L’aller-retour permet de laisser du matériel de ski au pied de l’arrête et de venir le récupérer une fois l’ascension terminée. Ne faisant rien comme les autres, on décide de choisir un itinéraire peu conventionnel en montant par l’arrête AD et en redescendant par la PD. On s’oblige donc à gravir l’arrête avec les skis sur le dos ainsi que tout le matériel de bivouac (tente, matelas, sac de couchage et réchaud). Pour couronner le tout, les conditions météo ne se montrent pas très clémentes. Il est prévu que les sommets soient pris dans les nuages à cause du foehn et que le vent puisse être très violent sur les crêtes.

  Bref, pas mal de conditions en notre défaveur mais on décide tout de même de tenter l’aventure. Il faudra bien réévaluer les conditions au cours de l’expédition (technique du 3×3) et faire demi-tour si elles deviennent trop défavorables. Ayant déjà fait la montée de Blatten à Belalp en peaux le weekend d’avant avec Lisa, on peut se permettre de prendre les remontées cette partie pour économiser quelques centaines de mètres de dénivelé. Pour rappel, nous voulons au final relier tous les 4000 des Alpes avec nos tracés GPS uniquement, par la force musculaire (et sans guide). Une fois en bas des pistes de Belalpe, on clipse nos inserts Dynafit et l’on part à plat jusqu’à l’hôtel Belalpe sous un soleil de plomb. Dur de croire la météo qui prédit un revirement drastique des conditions. Arrivés à l’hôtel, la suite semble se gâter : de toute part, des falaises et des talus descendants à pic. Il n’y a pas de trace et pour continuer il nous faut traverser ce terrain escarpé. A l’aide du tracé GPS, on s’élance vers l’inconnu en tentant une trace par le passage le moins casse gueule. En éclaireur, je scrute le terrain afin de trouver le meilleur passage pour faire la traversée. J’arrive en bordure de la falaise, il n’est plus possible de continuer plus loin. J’aperçois alors un semblant de replat, une trentaine de mètres plus bas, qui ressemble à un chemin. Ski sur le dos, on descend dans ce petit couloir pour rejoindre ce qui s’avère être le chemin d’été. Une fois sur la bonne voie, il n’y a plus qu’à la suivre. Une fois la paroi de rochers passée, on traverse le plateau d’Oberaletsch. Pour passer le temps, on discute du futur de la vallée. Elle devrait voir apparaître un barrage turbinant l’eau du glacier et travaillant en pompage avec le barrage de Gibidum. Il est assez fou de s’imaginer le paysage modifié par un mur d’une centaine de mètres. On croise aussi le chemin de chamois et quelques coulées d’avalanches de fonte. A force de discuter, on en vient à louper la bonne route et l’on remonte bien 150m de dénivelé positif de trop. On profite de cette montée de moraine inutile pour manger un bout avant d’attaquer 150m de descente dans une pente de 40-45 degrés voir plus. De là, on remonte tout le glacier d’Oberaltsch en passant devant la Oberaletschhüte. On continue notre trace jusqu’au pied de l’Aletschhorn, après un arrêt forcé suite à une diarée-éclaire. Initialement, le pied de la face de l’Aletschhorn semblait l’endroit privilégié pour planter la tente et établir notre camp de base pour la nuit. Comme il restait encore quelques heures de lumière, on décide de gagner un peu de temps sur le trajet du lendemain : « tout ce qui est fait n’est plus à faire ». Après 12km et 1300m de dénivellation, le temps commence vraiment à changer. Nous avons la tête dans les nuages, le jour se couche et des flocons commencent à tomber. Finalement la météo n’est pas si à l’ouest que ça… Plus on avance, moins on perçois les rochers devant nous. On devrait voir le sommet de l’Aletschhorn, mais à sa place, un épais brouillard blanc s’assombrissant de plus en plus. On suit à nouveau la trace GPS à la lettre pour éviter de trop s’écarter de l’itinéraire. Selon notre altimètre et la carte, on devrait arriver sur une sorte de replat à 3000m. Effectivement, on arrive dans un mini replat. On dépose nos affaires, monte la tente, gonfle nos matelas, ouvre nos sacs et hop, au chaud ! Monstre plaisir que de se poser un peu après cette longue journée ! Mais on sait que la journée de demain sera incomparablement plus longue et exigeante, il nous faut donc prendre des forces ! Pour éviter de déclencher une nouvelle boule de feu dans la tente, on allume le réchaud à gaz à l’extérieur. On fond de la neige et la laissons bouillir pour réhydrater les lyophilisés. En attendant que l’eau chauffe, on se repose roulés en boule dans nos sacs de couchage.

Il fait -15°C à l’extérieur et l’eau ne semble pas chauffer. En contrôlant le réchaud, il s’avère que le feu s’est même éteint ! Plus de gaz ? Après un petit moment de panique, on remarque que la bonbonne n’est pas encore vide. Est-ce que le vent à l’extérieur est trop fort et aurait soufflé la flamme ? On ramène donc le Jetboil à l’intérieur pour finir la cuisson de l’eau. La flamme semble vraiment très faiblarde mais après bien 45min, on arrive enfin à la température d’ébullition. On laisse chauffer nos lyophilisé 8min puis on digère ces 650kcalories qui nous seront vitales pour le lendemain. Il nous faut ensuite faire fondre plus de neige pour avoir assez d’eau liquide pour le lendemain. Malheureusement, très rapidement, on se rend compte que ce ne sera pas possible. Avec le froid, les nouvelles bonbonnes de gaz de Décathlon ne brûlent que partiellement. Le mélange de gaz n’est pas adapté pour les -15°C. On aura utilisé une bonbonne de gaz complète pour deux repas… Pas d’autre choix que de remplir nos gourdes de neige et les laisser fondre la nuit au chaud dans nos sacs de couchage… On prépare deux réveils. Un a 3h du matin pour regarder si le brouillard s’est dissipé et un deuxième à 5h. Stéphane s’est réveillé à 3h et n’a vu qu’un épais brouillard en entrouvrant la porte. Personnellement, je n’ai rien vu du tout car j’ai dormi comme un loir jusqu’au réveil de 5h.

La chance était de notre côté: en 2h les nuages se sont dissipés. On profite de ce ciel totalement dégagé pour faire quelques photos de la tente. Quel plaisir de voir le sommet de l’Aletschhorn se dressant devant nous. C’est toujours plus motivant de voir l’objectif.

Une fois la tente pliée, matelas dégonflé, sac comprimé et le tout rangé comme un Tetris dans le sac de rando, on remet les skis. On slalome doucement mais sûrement dans la montée entre les crevasses.

On profite de l’excuse du lever de soleil pour faire une petite pause et prendre quelques images.

Après un deuxième arrêt éclair et quelques traversées sur de la neige bien glacée on arrive à la fameuse arrête sud-ouest du 4000.

Changement de type de terrain, on passe du glacier à une arrête.

On troque nos skis de rando et battons pour les crampons et piolets. Comme on ne redescendra pas par la même voie, on prend tout notre matériel avec. Les skis et les battons sont fixés au sac de rando, rajoutant du poids à l’arrière et déséquilibrant passablement le tout. C’est ainsi que l’on attaque la montée, entre passages de grimpe dans les cailloux et progression dans des goulottes de neige. Puis vers 3800m, dans une goulotte entre 35-40°, Stéphane commence à ressentir le mal des montagnes. Notre rythme d’ascension change drastiquement et l’on avance pas à pas. Le rythme est si lent que je me demande si l’on arrivera vraiment à 4194m. Sans nausé particulière, on continu tout doucement la montée. La situation ne s’améliore pas vraiment avec la déshydratation dûe au manque d’eau qui commence à se faire sentir. Je commence aussi à sentir les effets de l’altitude vers les 3950m. Pourtant le sommet n’est pas loin, on distingue clairement la croix ! On progresse par à-coups, une 20ène de mètres avant de devoir faire une pause pour reprendre notre souffle. Les derniers 100mètres doivent être les plus lents et les plus pénibles que j’ai eu à faire. Mais à force de mettre un pied devant l’autre, on arrive enfin à la croix, au sommet. On s’écroule sur la neige et l’on profite de la vue splendide !

Quel soulagement d’être arrivés et quel bonheur de contempler ce paysage ! Il est passé 13h et l’on a encore toute la descente devant nous. Je profite que l’on ait un poil de réseau pour avertir mon entourage que j’ai pris congé le lundi et que je suis au sommet de l’Aletschhorn pour qu’ils ne s’inquiètent pas trop. Le silence est interrompu par le bruit des palles d’un hélicoptère. Un super-puma de l’armée Suisse se pose 140m plus bas sur le glacier de l’Aletschhorn. J’hésite presque à courir en bas l’arrêter pour qu’il nous prenne en stop. Ce que je ne savais pas encore c’est qu’il allait nous falloir 2h de temps pour descendre ces 140m… Heureusement, la suite est une arrête PD (peu difficile), il ne devrait pas y avoir de grosse difficulté, non ? On attaque la descente par l’arrête PD en marchant sur une arrête en neige. Celle-ci devient progressivement rocailleuse et abrupte. On désescalade l’arrête mais il arrive un moment ou ce n’est plus possible. Plutôt que de continuer sur l’arrête, on décide de la longer à flanc de coteaux, dans le glacier suspendu. C’est vive glace, d’un bleu sombre et profond. D’une couleur magnifique mais franchement très flippante. On a très peu d’expérience en progression sur glace mais pas le choix, quand il faut y aller, faut y aller ! Sur moi, j’ai une broche de glace faisant partie de l’équipement obligatoire pour de la progression sur glacier. Heureusement que Steph en avait deux car avec une seule broche, on ne va pas loin… On visse une broche au début de la descente, Stéphane assure ma descente au demi-nœud d’amarre. Je descends de manière pas du tout sereine dans ce glacier suspendu entre 30 et 40° de pente. Je prie pour que mes crampons automatiques ne me lâchent pas au milieu de la descente. Quelques coups de crampons et de piolet plus tard, je visse la broche à glace suivante qui me servira de déviation à la corde et je continue la progression à l’horizontal. Une fois les 3broches vissées, c’est à mon tour d’assurer la descente de Stéphane en faisant un demi-nœud d’amarre sur la dernière broche. Dans son avancée, il récupère derrière lui les broches pour que l’on puisse les réutiliser par la suite. En cas de décrochage dans la descente, il pendulera au maximum de la distance entre lui et la prochaine broche. Une fois qu’il m’a rejoint à la dernière broche, il s’y longe aussi, me transmet les deux broches et je repars pour la suite. On réitère tout ce processus pour 3passages clefs. Ce n’était absolument pas prévu dans la planification originale et l’on sait déjà que l’on a pris bien 3h de retard. On est enfin à la place d’atterrissage de l’hélico de l’armée qui est depuis longtemps reparti. On continue la descente sur l’arrête enneigée. Un léger voile de cirrostratus commence à se former. L’ambiance commence à changer, le soleil crée un arc-en-ciel très photogénique dans ces nuages de haute altitude.

Ce phénomène est dû à la réfraction de la lumière dans les cristaux de glace en suspension dans les nuages. La beauté de ce phénomène s’estompe rapidement lorsque l’on se rend compte que la suite de l’arrête est à nouveau impraticable et que l’on va encore devoir descendre dans le glacier avec cette fois-ci une pente plus raide : dans les 40-45degrés. Pour ajouter une couche de difficulté, il y a la rimée à passer (démarcation très nette au départ du glacier, faisant ici dans les 3m de haut). Le problème de la paroi verticale de la rimée, c’est qu’il n’est pas possible de récupérer une des broches à glace s’il l’on descend. On ne peut pas laisser du matériel technique sur place (pollution, sécurité pour la suite et aussi parce que ça coûte un bras). Il existe une technique pour réussir à dévisser une broche à glace en enroulant précisément la corde autour de celle-ci et en tirant la corde une fois la rimée passée (« broche éjectable »). Entre savoir qu’il existe une possibilité et le faire sur le terrain sans jamais l’avoir pratiqué avant, il y a un monde. On part donc sur la même technique qu’avant pour descendre jusqu’à un pont de neige reliant le reste du glacier avec le haut de la rimée. En voyant la distance à descendre (170m en mesurant sur la carte), la motivation prend un coup. Avec 3broches à glace et une corde de 30m, il nous faudra descendre le glacier en 5fois. Le retard, la fatigue et la déshydratation commencent a devenir critiques. Heureusement, après 40m de descente et un doigt ouvert en vissant une broche, je repère un autre petit pont de neige. On descend jusqu’à la rimée en mettant du sang partout. Je mets une broche juste au-dessus et je descends sur le pont. Il a l’air de tenir. J’ajoute une deuxième broche au fond de la rimée pour assurer le coup. Je vais ensuite plus loin dans le glacier, me plante solidement dans la neige et assure, corde tendue, la descente de Stéphane dans la rimée. Tout se passe bien, le pont de neige a tenu, quel soulagement ! Une fois les deux en dehors de la zone de danger et plus dans une pente à 45°, on sort un sparadrap de la trousse de secours pour stopper le saignement de mon doigt. Heureusement pour nous, la suite devient plus facile.

Les pentes sont moins vertigineuses et l’on arrive enfin à mettre nos skis. On dévale le Mittelaletschgletscher dans une neige bien carton qui fait chauffer les mollets. D’en bas, on voit bien les crevasses et les pentes vertigineuses de l’Aletschhorn.

L’arrête était bien galère mais descendre par une autre voie serait juste du suicide.

Le ciel se couvre de plus en plus et l’on commence à avoir le phénomène de jour blanc. On ne distingue plus bien le relief dans la neige. Dur de voir les trous et les bosses dans ces conditions.

On passe à coté de belles grottes de glace mais il faudra malheureusement remettre leur visite a une autre fois. La nuit commence à menacer. On arrive au fameux glacier d’Aletsch. On a beau l’avoir déjà traversé une fois, il est toujours aussi impressionnant. Pas le temps de traîner, il faut le traverser pendant qu’il fait encore jour. Le jour blanc est maintenant si violent qu’il me faut allumer ma lampe frontalle pour voir si le terrain monte ou descend. Après quelques demi-tours à cause de crevasses, on tombe sur une vieille trace de ski sur le glacier. On part du principe que la personne ayant fait la trace a réussi à faire la traversée du glacier en vie, on suit donc la trace. Par endroit, il faut improviser un peu car la trace a totalement été effacée par le vent. On arrive tout de même rapidement à faire la traversée du glacier (bien plus rapidement que la première fois). La nuit est définitivement tombée, il est 20h. Il nous reste encore 300m de montée pour arriver sur les pistes du domaine skiable de Bettmeralp. Ça fait 14h que l’on fait de l’alpi. Encore plus déshydratés qu’avant, on mange de temps en temps un peu de neige pour diminuer l’effet pâteux de la salive dans la bouche. On se met ensuite en route pour la dernière montée. Par endroit, la neige est très dure et les skis de rando ne crochent pas super bien. Steph devant, glisse de temps à autre. Puis, d’un coup, il dévale la pente sur une petite dizaine de mètres. Rien de grave mais je vois que la fixation avant de son ski s’est arrachée et elle est restée sur son soulier. Nous voilà avec encore 200m de montée et un ski HS. Je prends ses skis et les fixe à mon sac. Stéphane enfile les crampons et continue le reste du chemin à pied. On se rend vite compte que l’on n’y arriverait jamais. Il s’enfonce à chaque pas jusqu’aux genoux. On continue tout de même mais quelques mètres plus loin, il disparaît dans la neige et s’enfonce jusqu’aux épaules. Il devait y avoir un petit mélèze sous la neige. Après quelques minutes à se débattre pour ressortir de son igloo, il nous faut trouver une solution.

Je ne peux pas me permettre de passer une nuit de plus ici car je dois donner des cours le lendemain. Je pense à laisser la tente à Stéphane et lui faire amener des raquettes. Je pense même à appeler l’hélicoptère mais bon, ça serait un peu la honte à 200m du domaine skiable non ? En désespoir de cause, on remet le ski en état sur un pied et on laisse un crampon sur l’autre. Il avance avec un ski un peu comme avec une trottinette. En mettant tout son poids sur un ski et les battons, cela semble bien aller. On avance quelques mètres, ça va lentement mais ça avance. Je suis soulagé, on arrivera sur les pistes si l’on continue comme ça !

Quelques lacés plus tard, on est au sommet du domaine skiable. Il est 21h30 et la dernière descente de cabine pour la plaine est à 22h50, il est encore possible de rentrer (il y a un train qui retourne à Brig à 23h40). La descente des pistes avec un ski ne se révèle pas très concluante. Stéphane dévale toutes les pistes à pied ou sur les fesses par moment. Nous voilà arrivés au départ des remontées ! Il est 22h30, juste avant le départ de la cabine. On profite pour prendre un coca au distributeur, quel bonheur après plus de 16h d’effort ! On descend en cabine, on prend le dernier train de la journée pour Brig puis on descend jusque chez moi en voiture. Heureusement, pas d’amende car j’avais payé le parking jusqu’à 18h… Evidemment, Stéphane n’a plus de train pour rentrer sur Fribourg et comme le traditionnel McDo post-4000 n’est pas ouvert, on se rabattra sur 400 grammes de pâtes pesto à 1h30 du mat. Un 4000m qui se transforme en journée de survie. On aura eu de tout entre escalade, arrête, traversée de glacier, descente sur broche, assurage, ski et bivouac ! Une journée bien éprouvante mais qui restera gravée à jamais dans nos mémoires. La revanche de l’Aletschhorn !
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